dimanche 21 juin 2009

Un monde sans énergies fossiles


L’humanité s’inquiète de la fin prochaine des réserves en énergies fossiles. Pour trouver un successeur au pétrole, il faudra être extrêmement imaginatif. Même par ces temps de crise les plans les idées les plus folles ne manquent heureusement pas.


A moins de quarante ans, l’israélien Shai Agassi entrait au comité directeur du géant allemand du logiciel SAP. Rien ne le prédestinait à sauver le monde, et pourtant un beau jour de 2007 il a commencé à réfléchir à la possibilité d’un monde sans pétrole. Lorsqu’il s’aperçut que 25% du pétrole était brûlé par les voitures, il s’est dit qu’il fallait commencer par inventer une voiture sans essence. Après avoir éliminé les moteurs à hydrogène (trop complexes à mettre au point en un temps rapide) et les biocarburants (extrêmement consommateurs en eau), il se pencha sur les voitures électriques. Le gros problème de ces véhicules réside dans la batterie. Même avec une avancée technologique majeure, une batterie électrique ne permettra jamais de parcourir une grande distance et même en mettant en place un réseau de stations pour recharger ces batteries, on butera toujours sur le temps nécessaire pour effectuer ce rechargement. C’est là que Shai Agassi a eu l’idée de génie : plutôt que de recharger la batterie, pourquoi ne pas en changer ? Très rapidement il imagina une sorte de station de lavage sur laquelle vous pourriez garer votre voiture et en moins d’une minute un robot s’occuperait de remplacer votre batterie épuisée par une batterie neuve.


Shai Agassi a alors quitté SAP pour fonder sa société baptisée Better Place. Doué aussi bien pour la technique que les affaires, il a très rapidement levé 400 millions d’euros pour développer son concept. Renault-Nissan a été le seul constructeur à lui faire confiance et s’est engagé à construire d’ici 2011 une voiture sans CO2 à moins de 20 000 euros, compatible avec le concept Better Place. Dans 2 ans, Shai Agassi pense disposer, pour la seule Israël, un réseau de 150 000 bornes de rechargement et d’une centaine de stations de changements de batteries. D’autres projets pilotes sont en cours au Danemark et en Australie.


Shai Agassi était invité à la conférence TED de cette année, et je vous recommande de l’écouter, tellement il est enthousiasmant.



J’aime en particulier les deux anecdotes qu’ils citent pour justifier qu’il faut développer une auto à 0% de CO2 et non pas réduire de 20% ses émissions:

  • Tout d’abord il rappelle que Kennedy s’était engagé à envoyer un homme sur la Lune et à le ramener, et non pas l’envoyer à 20% du chemin et à le ramener avec une probabilité de 20% (Shai Agassi fait allusion au paquet Energie-Climat que la Commission Européenne a entériné in extremis fin 2008. Dans cette directive, il est stipulé que d'ici 2020, les états membres de l'Union Européenne devront réduire de 20% leurs émissions de CO2, devront effectuer 20% d'économies d'énergie et produire 20% de leur énergie sous une forme renouvelable). 
  • Il cite aussi les discussions au sein du parlement anglais sur l’esclavage il y a deux siècles : certains parlementaires voulaient une suppression progressive, mais finalement l’esclavage fut aboli totalement. Moins d’un an après, la révolution industrielle démarrait. Selon lui, l’humanité devrait pouvoir basculer dans l’ère post-énergie fossile avec la même rapidité, mais il faut une rupture technologique radicale. Pour Shai Agassi, notre dépendance aux énergies fossiles, est un problème avant tout moral (notamment vis-à-vis des générations futures) comme l'esclavage.


Mais comment fournir l’électricité nécessaire à toutes ces batteries ? Avec des énergies renouvelables pardi ! Et les projets ambitieux ne manquent pas dans ce domaine. Le solaire est certainement celui qui bouge le plus en ce moment et la semaine dernière nous avons eu des nouvelles du projet pharaonique issu de la Fondation Desertec. L’objectif est d’installer de gigantesques centrales solaires au milieu du Sahara et d’acheminer ensuite l’électricité ainsi produite vers l’Europe. Ce projet à 400 milliards de dollars est soutenu par le Club de Rome, les électriciens allemands E.ON et RWE, ainsi que Siemens, Munich Re et Deutsche Bank. Une présentation aux investisseurs potentiels est prévue le 13 juillet prochain.


Pour que cette énergie puisse alimenter les automobiles de Shai Agassi, il reste à voir si le prix du MWh produit et acheminé vers l’Europe pourra l’être à un coût compétitif. En tout cas, tant que l'humanité continue à rêver de projets aussi utopiques, rien n'est fichu.


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