dimanche 9 octobre 2011

Un week-end avec les créateurs de Biosphere 2


Ce week-end, je me suis rendu à Aix-en-Provence pour assister à la conférence annuelle de l’Institut d’écotechnique aux côtés des créateurs du projet Biosphere 2 que je rencontrais pour la première fois (à l’exception de John Allen, l'inventeur visionnaire de Biosphere 2, et sa femme). J’ai toujours regretté d’avoir été trop jeune à cette époque et de ne pas avoir pu participer à cette épopée. Un rêve d’enfant se réalisait donc un peu en les rencontrant. J’ai trouvé beaucoup d’atomes crochus avec eux et ce petit week-end m’a fait un bien fou même si la plupart de mes interrogations sur notre monde demeure.


Créé en 1974 par John Allen (l’inventeur de Biosphere 2), l’institut d’Ecotechnique a pour objectif de gérer des projets permettant d’analyser l’interaction entre l’homme et différents biotopes par des approches pluridisciplinaires. Ils gèrent aujourd’hui une ferme dans la savane sur la côte Ouest de l’Australie (l’une des zones les moins peuplées au monde), une forêt tropicale à Puerto Rico, un ranch dans le désert du Nouveau-Mexique à Santa Fe, une galerie d’art ethnique à Londres, un bateau expérimental, l’Heraclitus et une magnifique bastide provençale, Les Marronniers, où le groupe organise notamment ses conférences annuelles.


Depuis 1974, des chercheurs prestigieux mais aussi des artistes s’y sont retrouvés pour réfléchir aux relations entre l’homme, la technique et la biosphère. Voir ici la liste et le programme de toutes ces conférences. L’édition de 1982 avait par exemple vu la naissance du concept de Biosphere 2 (dont la construction fut achevée en 1991), la réalisation emblématique mais aussi la synthèse de tous leurs autres projets (NB : Biosphere 2 n’appartient plus à l’Institut, ce que j’avais raconté dans un précédent post il y a deux ans). L’édition 2011 était consacrée à la Méditerranée selon une approche toujours pluridisciplinaire (géologie, biodiversité, histoire maritime et militaire, préhistoire, langages et traditions). Vous pouvez regarder le programme de la conférence ici. Les speechs seront bientôt en ligne, je les ajouterai sur ce blog.



Parmi la soixantaine de participants venus des quatre coins du monde (Australie, Alaska, Puerto Rico, Arizona, Nouveau Mexique, Angleterre, Afrique…), on trouvait les responsables de chacun des projets, des amis de l’institut et quelques invités (je suis venu à la demande de John Allen que j’avais rencontré à Paris avec sa femme pendant l’écriture de Siècle bleu, il y a deux ans). Je n’ai rarement rencontré une audience aussi variée et passionnée, dont l’état d’esprit faisait penser à celui de la Renaissance.


Mark Nelson et John Allen


J’ai par exemple partagé la chambre de Mark Nelson, le président de l’Institut et également l’un des huit « biosphériens » restés deux ans sous la bulle de 1991 à 1993.


Mark (troisième à droite), il y a 20 ans, le jour de la fermeture de Biosphere 2.

Longue discussion poétique avant de se coucher avec cet homme toujours marqué au fer rouge par cette expérience. En écoutant le bruit du mistral dans les feuillages des marronniers, il m’expliquait la frustration de ne pas avoir vraiment eu de vent dans la biosphère et aussi de ne pas avoir pu jouer dans la neige quand l’Arizona disparaissait sous les flocons (si vous voulez en savoir plus sur la vie dans la biosphère, je vous réfère à un autre post où j’avais relaté ma rencontre avec deux autres des huit biosphériens). Nous avons aussi parlé des baobabs du petit prince dont il sera question dans le tome 2 de Siècle bleu.


Bill Dempster dans l'Heraclitus


J’ai aussi passé un très long moment avec Bill Dempster, diplômé de Berkeley et ancien des laboratoires du Department of Energy américain (où j'ai également travaillé). Bill fut l'un des designers de l'Heraclitus et surtout le directeur de l'ingénierie de Biosphere 2. C'est un homme admirable avec une immense culture scientifique et technique, et bien plus encore (CV ici, pour faire taire les fanfarons qui affirment qu'il n'y avait pas de scientifiques dans l'équipe de Biosphere 2). Nous avons beaucoup parlé d’énergies renouvelables et notamment du projet Wind Fuels qu’il suit de près (en gros le projet consiste à utiliser l'énergie des éoliennes pour créer de l'hydrogène par électrolyse et enfin de le combiner au CO2 pour fabriquer n'importe quel hydrocarbure). Longue discussion aussi dans sa voiture sur le thème qui m’obsède depuis longtemps « comment changer ce monde ». Nous étions d’accord sur les constats et également assez accablés par l’ampleur de la tâche. J’ai senti chez lui et les autres, pourtant tous de grands visionnaires, un grand pessimisme sur la situation actuelle. Cela ne m'a pas rassuré. Ils ont passé pour la plupart le cap de la cinquantaine ou de la soixantaine (même le cap des 80 ans pour John Allen) et leurs illusions commencent à se dissiper. Les problèmes d’aujourd’hui sont bien plus complexes qu’il y a 30 ans et ils sont assez désemparés. Il faut qu’une nouvelle génération refasse un point pluri-disciplinaire sur la situation et sur les solutions possibles. Ce ne sera plus à eux de le faire, mais à nous. L’important est de continuer de rêver et de réfléchir.


Concernant leur rêve, ils restent persuadés que Biosphere 2 (appartenant depuis le mois de juillet à l’université d’Arizona qui n’en fait rien d’intéressant et y pratique uniquement des expériences qui brillent par leur réductionnisme) peut être réactivée en un ou deux ans (le bâtiment a été conçu pour durer cent ans). La fin du projet, descendu par de sombres intérêts financiers, leur a laissé un goût amer et triste. A mon grand regret, nous n'avons donc pas célébré les 20 ans de cette expérience - ce que je comprends -, mais il en a été beaucoup question.


Lui et les ex-membres de Biosphere 2 semblaient très intéressés par mon projet Siècle bleu (mais ont regretté qu’il ne soit pas traduit en anglais) ce qui va m’encourager à le pousser plus loin encore et de façon plus concrète, plus participative. Je ne sais pas encore comment mais je vais y réfléchir dès que j'aurai fini les corrections du tome 2. Si vous avez des idées ou des envies d’aider, contactez-moi !


J’ai aussi discuté avec des élèves de John Lilly (l’une des figures majeures de la contre-culture américaine, décédé en 2001), l’une étant une spécialiste de la communication avec les dauphins (discussion passionnée sur les dauphins militaires) et l’autre était un expert des caissons d’isolation sensorielle, deux thèmes-phares de Lilly. Ils restent persuadés que Biosphère 2 (appartenant depuis le mois de juillet à l’université d’Arizona qui n’en fait rien d’intéressant) peut être réactivée en un ou deux ans, et que le rêve pourrait continuer.


J’ai aussi fait la connaissance d’Alexandre Meinesz, l’un des speakers. Plongeur aguerri (3000 plongées) et surtout Directeur du laboratoire Ecomers à l’université de Nice (la ville où j’ai grandi jusqu’à 19 ans). C’est lui qui en 1984 avait découvert et alerté les autorités sur la fameuse algue tueuse, la Caulerpa Taxifolia, qui a envahi les fonds marins de la Méditerrannée (15 000 hectares au plus haut de l'invasion) après s’être échappée de l’institut océanographique de Monaco. Cette algue m’avait terrorisé pendant mon adolescence (heureusement que Biosphere 2 m’avait fait rêver à la même époque). Il m’a indiqué qu’après une expansion ininterrompue jusqu’en 2008, l’algue connaissait un recul de 80% pour des raisons qu’ils n’arrivent pas à expliquer (probablement une dégénerescence génétique), comme l'indique cet article du Point en septembre 2011 ou de Libé. Comme quoi le pire ne survient pas toujours. Alexandre a également présenté le projet MEDAM qui consiste à recenser toutes les constructions côtières (ports, criques, remblais) de la côté méditérannéenne française en vue d’établir l’impact sur la biodiversité marine côtière (la plus riche de toute). Le constat était assez effrayant.


Nous nous sommes tous rendus sur le Vieux-port de Marseille où leur navire l’Heraclitus était en escale. C'est une jonque chinoise en ferro-ciment de couleur noire et rouge, à l'allure unique, conçue et construite par John Allen et son équipe en 1975 dans la baie de San Francisco. Le RV Heraclitus entame un nouveau projet de deux ans autour de la Méditerranée dont le but est de rencontrer des hommes de la mer (marins, pêcheurs, gérants de bar…) pour que ceux-ci partagent leurs traditions, leurs anecdotes et leur vision sur l’avenir de leur mer, en vue de faire des propositions pour la préserver. Plus d'informations ici. J’étais d’autant plus heureux d’aller à Marseille que cette ville cache un secret qui joue un rôle très particulier dans le tome 2 de Siècle bleu, mais je ne vous en dis pas plus pour l’instant... Encore une drôle de coïncidence !


Voilà, donc un week-end très riche dont il faut que je continue à tirer les enseignements.

lundi 26 septembre 2011

Happy Birthday Biosphere 2 !

Il y a exactement vingt ans, le 26 septembre 1991, quatre hommes et quatre femmes refermaient le sas de Biosphere 2 derrière-eux et allaient vivre deux ans en autarcie quasi-complète sous cette serre afin de mieux comprendre la Terre (Biosphere 1) et préparer la colonisation de l'espace par les hommes.


Cette expérience, malgré ses ratés indéniables, reste pour moi l’une des plus incroyables aventures humaines. Les financiers derrière le projet ont tout fait pour que l'élan humaniste et pluridisciplinaire qui étaient à son origine, sombre dans l’oubli. D’ailleurs aujourd’hui je n’ai pour l'instant pas vu d’articles sur le net qui célèbre cet anniversaire. Sur le site www.b2science.org de l’Université de l’Arizona qui gère maintenant le site, il n’y a pas non plus la moindre mention de cet anniversaire. Le temps des pionniers a été gommé. Le tome 1 de Siècle bleu rendait à sa modeste façon un hommage à ce projet (même si la Grande Serre se fait détruire à la fin) et aujourd’hui c’est à ce blog de lui rendre un nouvel hommage et de lui souhaiter un bon anniversaire ! Mon voeu est vraiment que ce projet soit réhabilité et qu'on lui rende la place qu'il mérite.


Le week-end du 8 octobre j’aurai l’occasion de fêter cet événement plus dignement. J’ai en effet été invité par John Allen, 82 ans et fondateur de Biosphere 2, pour participer à la conférence annuelle de l’Institut d’Ecotechnique qui a lieu chaque année aux Marronniers près d’Aix-en-Provence. En effet, l’écriture de Biosphere 2 m’avait donné le prétexte pour le rencontrer, lui et le reste de l’équipe fondatrice du projet. Pour moi c’est un grand moment, car Biosphere 2 a été imaginée lors de l’édition de 1982 de cette série de conférences où se croisent les chercheurs et les penseurs les plus visionnaires.


Les informations sur l’édition de cette année, consacrée au climat et aux biotopes de la mer Méditerranée, se trouvent ici. Ceux qui ont déjà pu lire le tome 2 de Siècle bleu en avant-première savent que la Méditerranée y joue un rôle très particulier. Je ne vous en dis pas plus et je vous ferai un débriefing de cette conférence courant octobre.


Pour celles et ceux qui voudraient aller plus loin, j’avais consacré une série de quatre articles à cette expérience unique et polémique.


- Partie 1 : Biosphere 2, la genèse du projet,

- Partie 2 : Biosphere 2, construction et désillusions,

- Partie 3 : Biosphere 2, rencontre avec des Biosphériens.

- Partie 4 : Biosphere 2, la vérité qui dérange.


Vous pouvez également lire cette page sur le site sieclebleu.org et également cette bibliographie commentée des neuf livres les plus importants pour comprendre Biosphere 2.


vendredi 16 septembre 2011

Poursuite du massacre des dauphins au Japon

Chaque année au mois de septembre commence l'horrible massacre des dauphins à Taiji au Japon. Lorsque le film The Cove qui dénonce si brillamment ce massacre peu connu est sorti en 2009 et qu'il a gagné l'oscar du meilleur documentaire en mars 2010, beaucoup ont pensé que les Japonais céderaient. Il n'en a rien été.
Dans le premier tome de Siècle bleu, sorti en avril 2010, j'ai ajouté ma petite pierre à l'édifice en écrivant deux pages sur ce massacre. C'est la scène d'ouverture de la première partie et vous pouvez lire ces pages gratuitement en ligne ici. Il n'y avait aucun effet de mode là-dedans puisque j'avais eu l'idée de cette scène en 2005 comme je l'explique ici. Siècle bleu n'a rien changé aux destins de ces dauphins non plus mais ce n'est pas pour cela qu'il faut renoncer. Il faut continuer à se battre pour que cette horreur cesse.
L'action de l'association "Save Japan Dolphins" de Ric'O Barry que vous pouvez suivre ici sur facebook) et les Cove Guardians de Sea Shepherd (l'organisation qui a inspiré Gaïa dans mon livre) et de nombreux autres militants ont permis de réduire significativement le nombre des dauphins tués (ou capturés pour être vendus aux delphinariums ce qui est de loin la partie la plus lucrative de ce business) pendant la saison 2010/2011. C'est très difficile de savoir de combien. D'ailleurs si l'on se réfère au site Ceta-base, avec un peu plus 1300 dauphins tués dans The Cove en 2010/2011 on est au même niveau que dans les années précédentes (mais ces années-là, il y avait moins d'observateurs dont certainement de nombreux massacres non dénombrés).
La campagne 2011/2012 et les premiers massacres ont été constatés le 7 septembre. La vidéo ci-dessous ne montre pas le bain de sang (vous pouvez la regarder sans craintes) puisque les observateurs ont été arrêtés par la police. En revanche tous les dauphins ont disparu, dont une mère et son petit. Bande de connards.

mercredi 14 septembre 2011

Ombres et Lumières : le tome 2 de la saga Siècle bleu



Chères lectrices, chers lecteurs,


Je ne vous avais pas donné de nouvelles du tome 2 de Siècle bleu depuis le mois de mai et il s’est passé pas mal de choses entre temps. Il y a des bonnes nouvelles et des moins bonnes. La première chose que je peux vous dire est que livre s’intitulera Ombres et Lumières. Voici d’ailleurs en exclusivité le projet de couverture. N’hésitez pas à me faire part de vos impressions et de vos remarques.


Un petit point maintenant sur le planning. J’avais commencé l’écriture d’Ombres et Lumières en août 2010 et j’en ai remis une première version en mai 2011 à l’éditeur et à un groupe de dix lecteurs tests. L’accueil a été positif (cf. commentaires ci-dessous), mais chacun des lecteurs m’a fait des suggestions pour améliorer le récit (évidemment toutes différentes ce qui n’arrange pas les choses). J’avais moi aussi beaucoup de choses que je voulais changer, affiner ou refaire car j’ai écrit ce livre dans des conditions difficiles : la nuit entre 22h30 et 2h00 (j’ai un travail la journée et je m’occupe comme tout le monde de ma petite famille en rentrant le soir…).

Ce livre, dont la préparation a pris de nombreuses années, avait donc été écrit d'un jet. Ce sprint éreintant (l’absence de sommeil a été assez dure, surtout que je ne prends aucune substance – café, cigarette ou autres – pour tenir, uniquement de la musique dans laquelle je puise mon énergie) a quand même été bénéfique car il a donné au livre sa tension, son unité. Je ne crois d’ailleurs pas que l’on puisse créer si l’on n’a pas de contraintes ou de souffrance. Mais en relisant le texte en juin après un mois de pause, j’ai réalisé que je pouvais l'améliorer considérablement afin que la lecture soit plus aisée et que le message soit mieux compris.

Début juin j’ai donc décidé, seul, de réécrire complètement les 650 pages du livre (le premier n’en comptait que 450). Je n'aurais pas pu vivre avec les remords d’avoir publié un livre bâclé sur un sujet qui m’obsède depuis 15 ans. Cela a fait assez peur à l’éditeur (de nombreux auteurs s’arrêtent en milieu de chemin dans de telles entreprises de réécriture) mais dès les 50 premières pages il a vu la différence. Ses encouragements m’ont aidé à aller jusqu’au bout et je le remercie de sa confiance. Après deux mois de travail clôturés par une semaine de « vacances » en août seul chez moi à Paris (femme et enfants déjà partis) où j’ai écrit sans interruption de 8h du matin à 3h du mat tous les jours (expérience passionnante mais complètement déstabilisante psychologiquement et physiquement !), je suis venu à bout de l’hydre. Une nouvelle version a été envoyée à l’éditeur le 17 août ainsi qu’à un nouveau groupe de 10 lecteurs tests.

Les retours ont été encore bien plus vifs que pour la version de mai 2010. Je dis vifs et non pas unanimes car le propos (et non pas l'intrigue car la plupart des lecteurs ont englouti le livre en trois jours) de ce livre (qui va beaucoup plus loin que le tome 1) fait débat. Il introduit une hypothèse avec laquelle tout le monde n’est pas confortable, qui en a déstabilisé certains mais qui a fait rêvé la plupart des autres. Remuer les consciences était le but et il semble avoir été atteint. L’éditeur et moi avons donc été convaincus que cela avait justifié de prendre trois mois supplémentaires.

Où en sommes nous maintenant pour la date de sortie ? Pour octobre déjà, c’est mort depuis longtemps. Il me reste en effet à prendre en compte les dernières remarques (nombreuses mais plutôt mineures et faciles à corriger) et à faire quelques calages. Cela me prendra un mois maximum jusqu'à début octobre. Ensuite l’éditeur en a aussi pour un mois et demi à faire tout relire et mettre en forme, et trois semaines pour préparer l’impression et recevoir les exemplaires. Le livre sera donc au mieux disponible physiquement au mois de décembre. Là, je vous vois venir, vous vous dites « chouette, ça sort avant Noël. »…

Malheureusement ce n’est pas aussi simple que ça et c’est là que j’arrive avec ma mauvaise nouvelle… Pour que vous compreniez, il faut que je vous parle de certains arcanes du monde de l’édition. Dans la masse de livres qui sortent, pour qu’un ouvrage puisse avoir un écho, il vaut mieux qu’il suscite des articles de presse et des interviews radio dès sa sortie, sinon il risque de quitter les rayonnages assez vite. Or, un livre comme
Ombres et Lumières, long et complexe, doit nécessairement être envoyé au moins deux mois avant sa sortie aux journalistes (car oui les journalistes lisent les livres, n'en déplaise à certaines mauvaises langues, et j'ai eu des conversations très profondes avec tous ceux qui ont chroniqué le tome 1). En effet, les articles dans un mensuel se décident souvent plus d’un mois à l’avance et il faut donc donner le temps aux journalistes de le lire et de convaincre leur rédaction si le livre leur a plu.

Au mieux, la sortie d'
Ombres et Lumières peut donc être programmée mi-février 2012. Malheureusement, cette année 2012 tombe très mal car, comme vous le savez, le 22 avril et le 6 mai, nous avons les deux tours de l'élection présidentielle en France. Les éditeurs sont certainement les seuls qui préféraient les septennats aux quinquennats car les périodes d’élection présidentielle sont un cauchemar pour sortir des livres. Une sorte de "black window". En effet, dans la presse, les débats politiques mobilisent les colonnes et il est très difficile de faire parler d’un livre d’un auteur inconnu (sauf si évidemment ce livre est une merveille, ce que nous ne saurions prétendre).

Vendredi, tous les responsables de JBz&Cie et Hugo&Cie (la maison mère) se sont réunis et ils ont décidé que la période mars-mai 2012 risquait d’être fatale au lancement d’
Ombres et Lumières. Ils croient très fort dans ce livre et ils ont donc décidé de le sortir juste après le second tour, mi-mai 2012.

Je sais que pour celles et ceux qui attendent ce tome 2 depuis longtemps, cela fait très tard et j’en suis le premier déçu et désolé, d'autant plus j’ai vraiment dépensé toute mon énergie pour écrire ce livre le plus vite possible et qu’il est quasi fini. Néanmoins c’est un projet qui a germé en 1996 et décaler de février à mai pour donner davantage de chances à ce livre m’a finalement paru raisonnable. D’ici là, et pour vous faire patienter, j’essaierai de vous réserver de nombreuses surprises (ça ne remplacera pas le livre, je sais). Je vais notamment rassembler et mettre en ligne toute la documentation du tome 1, ce que je voulais faire depuis très longtemps (et je préparerai également la documentation du tome 2 pour qu’elle soit disponible au moment de la sortie).

Ce décalage est entièrement de ma faute mais quitte à vous décevoir, je préfère que ce soit sur le timing de la sortie que sur le contenu. Le tome 1 avait su convaincre un public varié et exigeant et je ne peux pas me résoudre à faire moins bien par simple manque de temps. L'écriture n'est pas mon métier, mais ce projet est devenu l'une de mes raisons de vivre. Il m'a occupé/dévoré presque la moitié de ma vie et pour moi et mes proches, il est fondamental qu'il soit aussi irréprochable que possible. Et promis le tome 2 ne finira pas sur un suspens insoutenable comme le tome 1, c'est vraiment la fin d'une aventure mais qui pourra se prolonger par d'autres.

En tout cas, je remercie Jacques Binsztok, mon éditeur, et Hugues de Saint-Vincent, le patron d’Hugo&Cie, d'avoir respecté mon choix et d'avoir bien voulu continuer à m'accompagner sur ce tome 2. Je remercie aussi ma femme et mes enfants qui ont accepté que je passe tout l'été derrière mon ordinateur…

Amitiés bleues,

Jean-Pierre Goux.

PS : Quelques commentaires des relecteurs d'
Ombres et Lumières :

Après un tome 1 très dense aussi bien du point de vue de l’action que du message humaniste, JP Goux nous avait (lâchement !) laissé en plein suspens. Avec ce second tome de la saga « siècle bleu », JP Goux nous emmène encore plus loin qu’avec le premier. Le lecteur est toujours transporté dans le tourbillon d’aventures des héros du premier tome, il y a toujours ces analyses très justes sur l’évolution de notre société, ses gangrènes et les remèdes que l’homme pourrait y apporter ; mais il y a une dimension nouvelle. Ce qui nous apparaissait comme une fable utopique semble plus concret, plus évident. Le lecteur est impliqué, la « Révolution bleue » trouve une résonance en chacun de nous et on se dit que ce roman pourrait être le début, ou du moins un élément d’un prise de conscience planétaire, ce qui est sans doute la volonté première de l’auteur.
Yannis Brun.


On retrouve avec plaisir les personnages de Siècle Bleu - Abel, Paul, Lucy, Fox, Carlson… et d'autres ! - aux prises avec le monde et eux-mêmes, dans un second opus plus onirique et fantastique que le premier. '"Ombres et Lumières'' relève le défi d'emporter le lecteur dans une aventure philosophique haletante qui allie les qualités d'un « page turner » avec celles d'une fiction introspective, quelque part entre les films de Michelangelo Antonioni et les romans de René Barjavel.
Jean-François Sigrist.

Ce tome 2 nous transporte encore plus loin que le Siècle bleu, oui oui, c'est possible ! Nous retrouvons deux héros galvanisés par leur quête et impliqués comme jamais pour sauver Gaïa et leur peau ! C'est une véritable course contre la montre qui s'engage entre les résistants et le machiavélique Cornelius Fox. Ils n'ont pas droit à l'erreur, ils ne peuvent avoir confiance qu'en eux mêmes, personne ne peut les aider et pourtant... Le rythme de ce deuxième opus (tome?) est haletant, une course contre la montre s'engage, les enjeux deviennent de plus en plus mondiaux et incontrôlables... et pourtant, cette révolte est entourée de poésie et de promesses en un avenir meilleur. Le rêve a finalement sa place dans un monde de plus en plus contrôlé...
Morgane Guichard.

Qu'il est bon d'enfin savoir ce qu'il advient de la réaction chinoise à l'outrance américaine. Enfin, on croit savoir, parce qu'au fur et à mesure que se déploient les arcs de l'intrigue, les réflexions et les révélations, le mystère ne fait que s’épaissir, et l'impatience devant l’avènement du Siècle Bleu en devient douloureuse. Et l'issue ne sera que plus éclatante, pour le meilleur ou pour le pire, au chanceux lecteur de le découvrir. Mais quoi qu'il arrive, on ressort de cette lecture avec un degré supplémentaire dans la connaissance et dans la sagesse. Mon coeur s'est déjà rempli de nouveaux rêves pour l’humanité, comme contaminé par l'esprit de Paul, Abel, et des autres protagonistes, certains nouveaux, et d'autres que l'on croyait connaître...
Michaël Boccara.

Tout d'abord un grand merci pour nous amener voyager dans le monde de ce siècle bleu , si proche et si loin á la fois ... Ne cesse jamais de nous faire rêver , et qui sait , bouger , á travers tes histoires emplies d'optimisme. J'ai pris le temps de relire une deuxième fois ce tome 2 pour encore être plus réceptif á la montagne de détails qui jalonnent ton ouvrage , et que d'abord j'avais survolé dévoré par l'excitation de l'aventure ... il y aurait matière á 10 livres en approfondissant certaines de tes parenthèses ...Quelle riche documentation est-on tenté de croire á mesure de la lecture ... mais non ! Pas tant que cela ; je pense que ces 2 ouvrages sont plus le reflet d'un idéal qui t'anime, filtré par ta sensibilité, ton éducation , tes valeurs et ton érudition . BRAVO !!!
Bernard Guillaumin.


Ce "thriller bleu" fait partie des livres que l'on oublie pas. L'intrigue, dans un monde de cynisme, d'ombres et de noirceurs, ne vous laissera aucun répit et la lumière, bleue, vous entrainera inévitablement, dans une sérieuse et bousculante reflexion. On ne sort pas tout à fait intact de cette lecture...et vous penserez sûrement, comme moi, dès la dernière page tournée: "Pourvu que Jean-Pierre Goux se soit déja remis à l'écriture pour nous proposer, au plus vite... la suite....."

Patrice Peyran.


Quel plaisir de découvrir la suite du Siècle bleu! C'est tout d'abord un veritable thriller, aux multiples rebondissements, ou, à la maniere d'une série américaine, Abel et ses proches vous tiendront en haleine du début a la fin; mais c'est beaucoup plus que ça, c'est aussi un livre d'une grande érudition dans lequel vous apprendrez beaucoup (sur le fonctionnement ou plutot le dysfonctionnement de notre société, mais aussi sur des sujets aussi variés que l'économie parallèle, les dauphins, la musique...) et surtout une belle histoire remplie d'humanisme qui transpire dans la poésie et l'espoir des messages de Paul Gardner et dans la générosité et le don de soi de certains personnages, dont un petit nouveau dans ce deuxième tome. Enfin c'est un livre profond, qui transmet des messages, au final étonnant et fascinant que j'ai eu la chance decouvrir.

Nicolas Degruson.


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Une humanité sans cap

Je viens de découvrir aujourd’hui une statistique inédite qui m’a fait peur. En fait non, c’est une statistique qui résume juste ce que je sens venir depuis très longtemps et qui se concrétise en ce moment. Cette statistique confirme que l’humanité est déboussolée et que nous arrivons au bout d’un système. Il ne faut pas en avoir peur, il faut au contraire se dire que c’est une opportunité extraordinaire de tout réinventer (le thème central d'Ombres et Lumières, le tome 2 de Siècle bleu, à paraître au printemps 2012, j'espère que ce ne sera pas trop tard).


Cette statistique a été publiée par la société Raise Partner, créée par mon ami François Oustry (nous étions ensemble en école d’ingénieur et c’est l’un des scientifiques que je respecte le plus). Cette société est spécialisée dans la conception de stratégies d’investissement avec un risque minimum (ou en tout cas maîtrisé). Vous vous dites quel rapport avec l'absence de cap de l’humanité ? Je vais y venir.


Pour expliquer simplement ce que fait cette société (mathématiquement c'est beaucoup plus complexe), ils commencent par calculer les corrélations entre toutes les secteurs de l'économie. Mathématiquement, la corrélation entre deux variables aléatoires est l’intensité du lien entre elles. Certains secteurs de l’économie sont traditionnellement très corrélés mais d’autres n’ont normalement aucun lien. Raise Partner propose ensuite des stratégies diversifiées qui font que si un pan de l’économie souffre, le reste du portefeuille ne souffre quasiment pas (en gros c’est l’illustration du principe de bon sens « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier »).


La construction de ce type de stratégies ne fonctionne que s’il existe des secteurs économiques non corrélés entre eux (sinon tous les oeufs sont dans le même panier). Or cela est en train de changer très vite, à un niveau jamais observé dans l’Histoire des marchés. C’est la première fois que je vois cela de façon aussi claire. L’article du blog de François Oustry de ce jour s’intitule d’ailleurs : Red alert on cross-sector correlations confirmed, (alerte rouge confirmée sur les corrélations inter-sectorielles) que je vais essayer de vous traduire ci-dessous. Cet article fait suite à un autre fort intéressant publié par François la semaine dernière : Le risque système atteint un niveau sans précédent.


Tout s’explique à partir des trois graphes suivants. La couleur d’un point de coordonnées (x,y) correspond à la corrélation entre le secteur industriel x et le secteur y.


(source Raise Partner)

  • Sur le premier graphe, vous avez une cartographie du marché dans des conditions « normales » telles qu’observées en décembre 2006. Les couleurs sont très diversifiées (donc les corrélations aussi) et les valeurs vont de -50% à 90%, avec la plupart des valeurs entre 0 et 50%.
  • Sur le second graphe, c’est une cartographie des marchés à la veille de la crise des subprimes d’octobre 2008. Les corrélations allaient de 62% (zones orange) à 95% (rouge).
  • Sur le dernier graphe, ce sont les conditions du marché en septembre 2011. Tout est rouge. La valeur minimum est de 84% et la plupart des corrélations sont au-delà de 90%. Cela veut dire qu’un choc (ou une bonne nouvelle) dans n’importe quel secteur économique affecte instantanément tous les autres. C’est du jamais vu. Le niveau d’impredictibilité des marchés a atteint un niveau historique qui démontre que l’humanité régie par la folie financière n’a plus de cap. Je vous conseille ardemment de suivre le blog de RaisePartner pour suivre l’évolution de ces graphes dans les prochaines semaines.

Il y a deux façons de prendre cette statistique. La première, pessimiste, c’est de se dire que c’est bientôt la fin de ce monde (les Mayas parlent de transition vers un autre monde plutôt que de fin du monde). En effet, avec ces corrélations toutes au rouge, la probabilité pour que tout s’effondre n’a jamais été aussi haute. L’autre façon, optimiste, est de se dire que pour la première nous vivons une crise planétaire et qu’aucun secteur du globe ne sera épargné, et que ceci peut créer un véritable éveil des consciences et une réaction des peuples planétaire. La situation actuelle des marchés où tout est corrélé à tout est l’aboutissement d’un processus de 40 ans de mondialisation qui touche à sa fin, mais sans ce processus l’humanité n’aurait peut-être pas compris ses erreurs et au lieu de se consommer à feu rapide comme maintenant, elle aurait pu se consommer à feu doux. Il y a donc encore l’espoir de changer. Mais vers quoi, car l’humanité n’a plus de cap ?


Pour moi, si l'humanité ne veut pas sombrer dans le chaos, il faut qu'elle trouve une idée directrice très forte, capable de changer l'état d'esprit général. Afin d’esquisser une réponse, voici en exclusivité un extrait du blog de l’astronaute Paul Gardner issu du tome 2 de Siècle bleu : Ombres et Lumières.




L’humanité s’est lancée sans cap dans ce nouveau siècle. Elle est comme une nuée d’oiseaux migrateurs qui ne trouverait plus le champ magnétique qui lui permet de s’orienter. À force de se mouvoir sans but, le relâchement et le déclin la guette. Elle s’épuise, se perd et se meurt.


Il est de la responsabilité de nos dirigeants de redonner un sens qui transcende chaque individu, qui restaure la ferveur de tous. Recréer les liens qui définissent notre espèce, gérer la finitude de nos ressources et arracher les baobabs du passé, voilà déjà l’embryon d’un projet collectif et fédérateur. Mais pour œuvrer ensemble à la construction de ce Siècle bleu, il faut une vision commune. De là où je me trouve, il y en a une qui paraît évidente : celle du vaisseau Terre, de cette petite planète bleue, découverte par les premiers astronautes. Dans la grande croisière cosmique, nous sommes tous embarqués sur le même esquif. Il faudrait envoyer les grands de ce monde dans l’espace pour qu’ils le réalisent enfin.


Plutôt que d’en faire un enfer et de nous détruire, apprenons à vivre ensemble. Définissons un rôle enthousiasmant, mais exigeant, pour chacun des membres de l’équipage. À bord du vaisseau Terre, les tâches pour les milliards d’humains ne manqueront pas. Répertorier les ressources, entretenir les jardins, les coursives et les moteurs. Nourrir, protéger, soigner et éduquer l’équipage en respectant les autres formes de vie. Mais aussi innover, en inventant les moyens qui permettront au navire de fonctionner indéfiniment.


Ce concept de vaisseau Terre serait quand même plus fédérateur qu’une économie folle dont nous ignorons la finalité. Certains avaient bien essayé d’infléchir cette tendance en proposant la notion de « développement durable ». Mais sans changer l’état d’esprit, il est impossible de découpler croissance économique et utilisation des ressources naturelles.


Osons affronter le défi du Siècle bleu avec un projet à sa mesure. Gréons le vaisseau Terre ! L’humanité se redressera alors, retrouvera sa dignité au sein du cosmos et pourra poursuivre son chemin, apaisée.

samedi 6 août 2011

Exclusivité : Faillite des Etats et Siècle bleu 2


L’augmentation de la dette des Etats et en particulier celle des Etats-Unis me hante depuis des années. L'histoire s'accélère. A l'heure où nous venons d'apprendre la dégradation de la note américaine de AAA à AA+ (Standard & Poors aurait dû le faire depuis bien longtemps), je vous livre en exclusivité un chapitre du tome 2 de Siècle bleu en cours de préparation, où justement cette question est abordée. J'ai écrit ça il y a presque un an. Il s’agit d’un face-à-face entre Abel (le leader de l'organisation écologiste Gaïa) et le président américain Carlson. Bonne lecture !


- NB : lire ce chapitre ne révèle rien de l'intrigue ! -


– Je vais vous confier quelque chose, Carlson. Lorsque vous avez été élu, je croyais vraiment que vous seriez capable d’influer sur le cours de l’Histoire. Sur l’environnement, la sécurité sociale ou la politique étrangère par exemple. J’avais confiance en vous.

– Je sais ce que vous pensez de mon bilan. Mais avant de juger, il faut vous remémorer dans quelles circonstances, j’ai repris ce pays.


Carlson évoqua le bourbier irakien, mais lui rappela surtout « la crise financière dans laquelle le pays s’était empêtré à cause d’une bande d’escrocs et d’incompétents qui avaient alimenté une bulle spéculative innommable sur les crédits accordés aux plus pauvres ». La fameuse crise des subprimes. Les nations, c’est-à-dire les contribuables, s’étaient saignées pour éviter l’écroulement du système financier, ne laissant plus aucune marge de manœuvre pour financer le progrès social.


– Après cela, les banques nous tenaient, reconnut Carlson. Alors même que ce sont elles qui nous avaient plongés là-dedans ! Nous avons accouché d’un parasite redoutable.


Carlson lui expliqua que personne n’avait mesuré les conséquences ni le coût du dispositif de sauvetage mis en place. Les technocrates qui l’avaient conseillé avaient tous travaillé dans de grandes banques de Wall Street et celles-ci avaient réalisé des profits colossaux sur le dos du programme.


– Personne ne comprend plus rien au fonctionnement de l’économie américaine. Si vous regardez froidement la situation, c’est un pays surendetté qui devrait être en faillite depuis longtemps. Je ne sais même pas comment nous sommes encore debout. On m’a dit que nous tenions que parce que notre monnaie était la référence et que tout le monde détenait des dollars. Le spectre de la faillite des États-Unis est tellement effrayant que personne ne laissera faire. L’ensemble de la planète paiera pour l’éviter, mais cela ne fera que retarder l’inéluctable. Avec la dette, l’humanité a accouché d’un autre parasite mortel.


Depuis quinze ans, l’économie occidentale avait financé son développement avec la dette. Les politiques avaient trouvé l’artifice permettant de donner au peuple l’illusion que tout allait bien et de se faire réélire. En réalité, ils avaient hypothéqué l’avenir de leur pays en condamnant les générations futures à rembourser des dépenses inutiles. Une prise de conscience était nécessaire avant l’implosion.


Abel poussait le raisonnement encore plus loin : les États-Unis entraîneraient le reste du monde dans leur chute et, au lieu de au lieu de couper massivement leur budget militaire, ils consacraient toujours autant aux dépenses d’armement. Quand viendrait l’heure des comptes, ces armes feraient la différence. La perspective d’une guerre lui glaça le dos.


– Pour faire semblant de rembourser notre dette, on m’a poussé à faire des choses folles. Par exemple, nous avons émis de nouveaux emprunts qui ont été souscrits par la Réserve Fédérale elle-même ! C’est impensable, mais la planète financière a laissé faire, sans rien dire, tant la faillite de notre pays est inimaginable. Le système vit dans une éternelle fuite en avant. Il explosera tôt ou tard. Et pendant ce temps-là, la fête continue. Ainsi va la vie.


Abel était pantois. Même le président ne savait pas où le pays allait.


– Mais qui pilote ce pays, alors ? demanda Abel.

– Personne, lâcha le président. D’ailleurs, plus généralement, personne ne pilote cette planète. Certains croient à une théorie du complot, il n’y en a pas. Il y a juste des gens avides d’argent, partout, qui espèrent chacun grappiller les miettes d’empires qui s’effondrent. C’est une convergence d’intérêts nihilistes. Dans ces conditions, comment vouliez-vous que mon bilan soit positif ? Il y avait trop de forces sombres à combattre pour faire changer les choses.


Abel en tremblait. Le monde allait encore plus mal qu’il ne l’imaginait. Carlson était lancé, Abel l’écoutait avec attention.


– Heureusement certains, comme vous ou les acteurs de la société civile, essayent, à leur échelle d’améliorer les choses ou de les rendre moins tragiques. Si l’on jette un regard optimiste sur tout ça, plutôt que d’un effondrement, l’humanité est peut-être à l’orée d’une métamorphose. En même temps que l’on observe des signaux au rouge sur tous les fronts, on assiste à un réveil de l’empathie. Et puis les problèmes étant mondiaux, cela poussera à avoir une réponse planétaire. Néanmoins, la transition risque d’être longue et sanglante. Ceux qui détiennent le pouvoir et l’argent, vivent dans une peur totale et seront capables du pire pour s’accrocher à leur place encore un peu plus.


Abel partageait avec Carlson la nécessité d’une réaction rapide.


– Le monde est tenu aujourd’hui par les hommes politiques, les industriels et le crime organisé, poursuivit Carlson. Trois classes très imbriquées et qui ont peur. Très peur. Les hommes politiques ont peur de ne pas être réélus, les industriels ont peur de leurs actionnaires et de leurs concurrents, les criminels ont peur pour leur vie. Et je ne parle même pas de la peur qui ronge les simples citoyens. Une société qui a peur ne peut aller nulle part car chacun lutte pour sa survie et vit dans le présent.


Abel le regardait, il n’avait malheureusement rien à redire. Comme souvent dans l’Histoire, l’Humanité s’était enfermée, toute seule, dans une impasse.


– Dans ces conditions, les réactions collectives sont presque impossible, poursuivit Carlson. Prenez l’environnement, le sujet qui vous tient à cœur. C’est une évidence, il faut préserver les ressources de cette planète et réduire notre empreinte écologique. Tout le monde est d’accord avec ça. Pourtant, dès que l’on se tourne vers les contribuables, personne ne veut faire d’effort. La problématique écologique a révélé tous les dysfonctionnements de notre civilisation occidentale : cupidité, aveuglement, incompétence et immobilisme.


Depuis le sommet de Rio de 1992, qui avait tant marqué Abel, vingt années s’étaient écoulées. Malgré les discours et les efforts de certains, rien ne s’était produit. L’Humanité avait continué à plonger et la problématique environnementale ne pourrait être résolue que si l’on s’attaquait aussi aux autres maux qui rongeaient les sociétés humaines. La tâche était herculéenne et pour nettoyer ces écuries d’Augias, il faudrait une véritable prise de conscience planétaire. Comment y parvenir ?


– L’Homme est une espèce extraordinaire mais vraiment idiote, résuma Carlson. Paul Gardner l’avait bien dit.


PS : Il va falloir que je me dépêche car la réalité rattrape la fiction. La sortie du tome 2 ne sera malheureusement pas pour octobre 2011, 650 pages à peaufiner c’est très long quand on travaille et que l'on a deux enfants en bas âge. Mais je vois le bout et j'ai une semaine de vacances tout seul à partir de demain pour finir. Je vous tiens au courant d’ici quelques semaines dès que l'éditeur aura tout relu et qu'il aura fait le planning.

PS : Rassurez-vous, dans le tome 2, il est question de thèmes très durs comme celui-ci mais aussi de réflexions plus lumineuses. Noircir ne suffit pas, il faut essayer d'éclairer.